RSOC Vol. 13 No. 17 2016 pp 29-30. Publié en ligne 31 mars 2017.

Présentation générale de la prise en charge des affections oculaires liées au diabète

Nicholas Beare

Ophtalmologiste chef de service, St Paul’s Eye Unit, Royal Liverpool Hospital, Liverpool, Royaume-Uni.


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Examen oculaire d’une patiente diabétique. OUGANDA © Terry Cooper
Examen oculaire d’une patiente diabétique. OUGANDA © Terry Cooper

Il existe plusieurs types d’intervention pour lutter contre la perte de vision liée au diabète, dont la maîtrise des facteurs de risque systémiques et la photocoagulation au laser.

Facteurs de risque systémiques

Afin de réduire le risque que les affections oculaires liées au diabète (rétinopathie et maculopathie) ne progressent et n’entraînent une perte de vision, il est important que toutes les personnes atteintes de diabète se maintiennent en bonne santé et contrôlent bien leur diabète. Ceci est particulièrement important dans le cas de patients présentant une rétinopathie diabétique (RD) qui affecte déjà leur vision ou risque de l’affecter dans un futur très proche.

Les deux facteurs de risque les plus importants sont une glycémie (taux de glucose sanguin) élevée et une hypertension artérielle. La présence d’un taux élevé de cholestérol et de lipides sanguins semble également être liée à l’aggravation de la RD. Pour réduire le risque d’évolution de la RD, vous pouvez traiter le taux élevé de cholestérol et de lipides sanguins avec des statines, si ces médicaments sont disponibles, et le maintien d’une bonne hygiène de vie générale aura un effet bénéfique sur l’évolution de la RD. Une bonne hygiène de vie inclut l’absence de consommation de tabac (ou l’arrêt du tabagisme) et la pratique régulière d’exercice physique.

Les personnes diabétiques doivent également avoir une alimentation saine et éviter autant que possible la consommation de sucres et de glucides raffinés. Les professionnels de la santé oculaire ont un rôle à jouer dans l’identification des patients à risque d’une perte de vision par RD et dans le renforcement des messages sur le contrôle du diabète et le maintien d’une bonne hygiène de vie. Le dépistage de la RD et le traitement au laser de la RD, notamment, offrent aux professionnels de la santé oculaire l’occasion de communiquer ces messages aux patients.

Traitement au laser de la RD et de la maculopathie

Le laser constitue le traitement de base pour la RD comme pour la maculopathie. Le Tableau 1 résume les indications, les indicateurs de réponse souhaitée, les indicateurs de réponse insuffisante, et les effets secondaires de ces deux traitements, s’inspirant des deux articles en pages 31 et 34 de ce numéro sur la prévention de la perte visuelle due à la RD et de celle due à la maculopathie. Vous trouverez un glossaire en page 33 et un poster récapitulatif au centre de ce numéro (pages 36–37).

Conseils pour réussir un traitement au laser

  • Assurez-vous que le patient comprend les limites du traitement et qu’il nourrit des attentes réalistes.
  • Assurez-vous de focaliser le laser et la lampe à fente dans le même plan.
  • Prenez bien soin de focaliser le laser et d’ajuster sa puissance.
  • Si vous réalisez une photocoagulation pan-rétinienne, assurez-vous de traiter le quadrant temporal de façon adéquate, jusqu’au bord de la macula.
  • En cas de photocoagulation macular:

    −− Couvrir la zone d’oedème maculaire diabétique (OMD) de manière systématique, car il se peut que cette zone oedémateuse n’absorbe pas bien l’énergie du laser.

    −− Si vous ne visualisez pas bien la fovéa, appliquez le faisceau en dehors d’une zone contenant forcément la fovéa.

  • Si vous avez des difficultés à appliquer un impact d’intensité suffisante ou si l’intensité de l’impact se met à varier, alors enlevez la lentille de contact et appliquez à nouveau du gel de couplage.

Tableau 1. Indications, indicateurs de réponse et effets secondaires du traitement au laser de la maculopathie et de la rétinopathie diabétique (RD)

Traitement au laser de la RD : photocoagulation pan-rétinienne (PPR) Traitement au laser de la maculopathie (photocoagulation focale ou en grille)
Indications RD pré-proliférante sévère

Règle du « 4, 2, 1 »

RD proliférante

RD proliférante avec éléments « à hautrisque » (néovascularisation ou hémorragies intravitréennes)

OEdème maculaire cliniquement significatif (OMCS)

OEdème maculaire diabétique (OMD) touchant le centre de la fovea

Exsudats menaçant ou affectant la vision

Réponse souhaitée Régression de la néovascularisation

Prévention de la formation de nouveaux vaisseaux

Diminution de l’OMD

Prévention d’une détérioration supplémentaire de la vision

Réponse insuffisante ? Refaire une séance de PPR en augmentant la densité et l’étendue des impacts

Continuer les séances

Une fois que vous avez recouvert toute la zone oedémateuse (ou, dans le cas d’un OMD diffus, toute la macula) avec des impacts disposés en quinconce (photocoagulation dite « en grille »), il n’y a aucun intérêt thérapeutique à continuer cette photocoagulation en grille.

Vous pouvez cibler des microanévrysmes spécifiques

Effets secondaires et complications Diminution de la vision nocturne et de la vision périphérique

Déclenchement/aggravation d’un OMD

Brûlure fovéolaire (rare)

Brûlure fovéolaire

Scotomes paracentraux en cas d’impacts délibérément proches du centre

Diabète et santé oculaire : suggestions pour mieux communiquer avec les patients

Affiches de sensibilisation à la rétinopathie diabétique. INDE © Aravind Eye Care System
Affiches de sensibilisation à la rétinopathie diabétique. INDE © Aravind Eye Care System

Le diabète est une maladie complexe dont la prise en charge requiert l’intervention de plusieurs types de professionnels de la santé. De ce fait, les patients diabétiques doivent se rendre à de multiples rendez-vous et doivent assimiler une multiplicité de messages concernant leur santé. Ces messages concernent notamment leur glycémie (et dans quel intervalle il faut la maintenir, dans l’idéal), la santé de leurs pieds (et les signes précurseurs à rechercher), la vérification de leur fonction rénale et les examens oculaires à effectuer.

Les professionnels de l’ophtalmologie doivent surmonter le défi d’engager une discussion sur le lien entre santé oculaire et diabète avec des patients diabétiques qui sont souvent asymptomatiques. Ils doivent les encourager à subir des examens oculaires réguliers et à suivre le traitement qui leur a été prescrit, le cas échéant (page 40).

Lorsque des patients diabétiques se présentent dans un centre de soins oculaires ou un service d’ophtalmologie, nous pouvons aussi les aider à maintenir une bonne santé générale et à bien suivre leur traitement pour le diabète, en leur offrant les informations et le soutien nécessaires. Ceci est important car une bonne maîtrise du diabète permet de ralentir l’évolution des affections oculaires liées au diabète.

Voici quelques suggestions pratiques que nous pouvons mettre en oeuvre :

  • Envoyer régulièrement des rappels aux autres professionnels de la santé (en milieu hospitalier ou communautaire) afin qu’ils informent les patients diabétiques de l’importance de subir des examens oculaires annuels et leur expliquent où se rendre pour ces examens.
  • Discuter avec les patients diabétiques de l’ensemble des examens qu’ils doivent subir et des consultations auxquelles ils doivent se rendre (sans oublier leur fréquence). Encourager les patients à respecter leurs divers rendez-vous et rester en contact avec les collègues d’autres spécialités pour pouvoir offrir aux patients toutes les informations dont ils ont besoin. Ceci aidera les patients diabétiques à obtenir des rendez-vous et à les respecter.
  • Informer les patients sur la façon dont ils peuvent rester en bonne santé et maîtriser leur diabète. Ceci ralentit l’évolution des affections oculaires liées au diabète. Même si ce n’est pas la première fois que les patients sont exposés à ce type d’informations, tout changement prend du temps et ces patients ont besoin de soutien et d’informations en continu.
  • Informer les patients sur leur cas particulier et personnaliser l’information autant que possible. Employer les propres photographies rétiniennes du patient pour lui montrer l’évolution de sa rétine (mais ne surtout pas le culpabiliser) ou s’appuyer sur un poster comme celui qui figure en page 36 de ce numéro (la colonne de droite offre des suggestions sur la manière d’aborder la situation du patient et son évolution possible).