RSOC Vol. 13 No. 17 2016 pp 44-45. Publié en ligne 31 mars 2017.

Comprendre les lasers oculaires et les utiliser en toute sécurité

Ismael Cordero

Ingénieur biomédical, Philadelphie, États-Unis.


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Traitement au laser d’une rétinopathie diabétique proliférante. AFRIQUE DU SUD © Elmien Wolvaardt Ellison
Traitement au laser d’une rétinopathie diabétique proliférante. AFRIQUE DU SUD © Elmien Wolvaardt Ellison

Familiarisez-vous avec votre équipement pour allonger sa durée de vie et l’utiliser au mieux durant votre pratique clinique. Dans ce numéro : les lasers oculaires.

Les lasers oculaires permettent le traitement précis de plusieurs problèmes oculaires avec un faible risque d’infection. Beaucoup de traitements au laser sont relativement indolores et peuvent être effectués en ambulatoire. L’alliance de la sécurité, de la précision et de coûts relativement faibles fait des lasers des outils très utiles en ophtalmologie.

Le mot laser est l’acronyme de « Light Amplification by Stimulated Emission of Radiation », soit en français amplification de la lumière par émission stimulée de radiations. La lumière laser est cohérente (cohérence spatiale et temporelle des ondes lumineuses), monochromatique (une seule couleur ou longueur d’onde) et collimatée (la lumière est émise en un faisceau étroit dans une direction spécifique). Les faisceaux lasers sont générés par l’excitation d’atomes à un état d’énergie supérieur à la normale. La lumière (ou rayonnement) laser est émise lorsque les atomes reviennent à leur niveau d’énergie originel.

Les principaux composants d’un système laser sont la console laser, la pédale de pied et le système de transmission du faisceau laser. Différents systèmes de transmission, connectés à la console par un câble en fibres optiques, peuvent être utilisés pour transmettre l’énergie du faisceau laser à l’oeil du patient (voir Figure 1) : une sonde endoculaire (petite sonde en fibres optiques insérée dans l’oeil), une lampe à fente, un microscope opératoire ou un ophtalmoscope indirect.

Figure 1. Les différents composants d’un système laser  © Ismael Cordero
Figure 1. Les différents composants d’un système laser © Ismael Cordero

Il existe différents types de lasers oculaires, qui émettent chacun une longueur d’onde propre et servent à traiter des problèmes oculaires spécifiques. Le nom attribué à chaque laser vient généralement de la substance active utilisée. Par exemple, la substance active d’un laser argon est le gaz d’argon, alors que le laser YAG contient une substance solide composée d’un grenat d’yttrium-aluminium.

L’effet d’un laser sur les tissus oculaires est fonction de la composition moléculaire du tissu, ainsi que de la longueur d’onde et de la puissance du laser. En fait, l’effet destructeur du laser sur les tissus ciblés a un effet bénéfique sur l’oeil.

Le laser argon émet un rayonnement de longueur d’onde bleu-vert absorbé par les cellules situées sous la rétine et par l’hémoglobine du sang. Ces rayons de longueur d’onde bleu-vert peuvent traverser le fluide à l’intérieur de l’oeil sans provoquer de lésions. C’est pourquoi le laser argon est largement utilisé dans le traitement de la rétinopathie diabétique. Le laser argon peut brûler et cautériser les vaisseaux sanguins qui fuient : c’est ce qu’on appelle la photocoagulation.

Le décollement de rétine est un autre problème oculaire sérieux qui peut être traité au laser argon. Le laser est utilisé pour souder la rétine décollée à la choroïde sous-jacente.

Certaines formes de glaucome peuvent également être traitées avec des lasers argon. Par exemple, en cas de glaucome par fermeture de l’angle, on peut utiliser un laser argon pour créer un petit orifice dans l’iris pour permettre à l’humeur aqueuse de mieux circuler à l’intérieur de l’oeil et réduire ainsi la pression intraoculaire.

La dégénérescence maculaire est parfois traitée avec un laser argon ou un laser krypton. Dans ce cas, le laser est utilisé pour détruire les vaisseaux sanguins anormaux pour empêcher que la vision centrale ne soit endommagée par des hémorragies ou la formation de tissu cicatriciel.

Le laser YAG infrarouge à 1064 nm génère des rayons lumineux à impulsions courtes et à haute énergie capable de couper, perforer ou fragmenter des tissus. Lorsque les patients développent une opacification de la capsule postérieure après une opération de la cataracte, le laser YAG est communément utilisé pour vaporiser une portion de la capsule ce qui permet à la lumière d’atteindre pleinement la rétine. Un laser YAG vert à double fréquence (longueur d’onde de 532 nm) peut également être utilisé pour réaliser une capsulotomie dans le traitement du glaucome par fermeture de l’angle. Il produit des résultats similaires à ceux d’un laser argon.

Les applications du laser diode sont similaires à celles du laser argon et du laser YAG. Un laser diode présente les avantages suivants : il est beaucoup plus petit et facile à transporter, il produit moins de chaleur et demande bien moins d’entretien que d’autres types de lasers.

Les systèmes lasers incluent également un pointeur laser rouge, ou faisceau laser de ciblage, qui n’endommage pas les tissus et permet au chirurgien de voir où sera placé l’impact du faisceau laser utilisé pour le traitement.

Utilisation des lasers en toute sécurité

Pour assurer une utilisation sécurisée et prévenir les dangers et les expositions intempestives aux faisceaux laser, vous devez suivre les mesures de protection suivantes :

  • Pour empêcher toute exposition involontaire à l’énergie laser, consultez et observez toujours les précautions de sécurité précisées dans le manuel de l’opérateur avant d’utiliser l’appareil.
  • L’appareil laser ne doit être utilisé que par un médecin qualifié.
  • N’utilisez jamais un appareil laser si vous pensez qu’il ne fonctionne pas correctement.
  • Ne pliez pas les câbles de fibres optiques et ne tirez pas dessus. Lorsque vous les rangez ou les stockez, enrouleuses en larges boucles pour ne pas endommager les fibres optiques.
  • Toutes les opérations d’entretien et de calibrage d’appareils lasers doivent être faites par des techniciens agréés par le fabricant de l’appareil.
  • Lors de traitements au laser, placez une pancarte sur la porte de la salle de traitement pour informer les gens qu’un traitement au laser est en cours et qu’ils ne doivent pas entrer (Figure 2).
  • Figure 2. Pancarte d’avertissement
    Figure 2. Pancarte d’avertissement
  • Les rayons laser réfléchis sur des surfaces réfléchissantes peuvent endommager vos yeux, ceux du patient et ceux d’autres personnes. Tout miroir ou objet métallique susceptible de réfléchir les rayons laser peut constituer un danger de réflexion. Assurez-vous de retirer tout danger de réflexion à proximité du laser. Utilisez autant que possible des instruments non réfléchissants. Faites attention à ne pas diriger involontairement le faisceau laser sur des objets qui ne doivent pas être ciblés.
  • Tout le personnel se trouvant dans la zone de traitement doit porter des lunettes de protection laser adéquates, conçues pour filtrer la longueur d’onde et la puissance spécifiques du laser utilisé. Le choix des lunettes de protection est dicté par l’Exposition maximale permise (EMP), la Zone nominale de danger oculaire (ZNDO) et la Distance nominale de danger oculaire (DNDO) de chaque appareil de transmission utilisé avec le système laser, ainsi que par la configuration de la salle de traitement. Pour des informations complémentaires, consultez le manuel de l’utilisateur de l’appareil laser ainsi que les normes et directives internationales sur l’utilisation des lasers.
  • Des filtres de sécurité (Figure 3) protègent le médecin des rayons laser rétrodiffusés. Des filtres de sécurité oculaire intégraux doivent être installés de façon définitive sur toute lampe à fente et ophtalmoscope indirect utilisés pour le traitement laser. En cas d’endophotocoagulation au laser ou d’utilisation avec un microscope opératoire, il faut installer un filtre de sécurité oculaire séparé sur chaque visée du microscope opératoire. Tous les filtres de sécurité oculaire ont une densité optique (DO) à la longueur d’onde du laser qui est suffisante pour permettre à l’utilisateur de visionner à long terme la lumière laser diffuse.
  • Figure 3. Positionnement d’un filtre de sécurité  © Ismael Cordero
    Figure 3. Positionnement d’un filtre de sécurité © Ismael Cordero