Prise en charge combinée de la presbytie et de la cataracte durant des missions de stratégie avancée : expérience d’un centre d’ophtalmologie en Côte d’Ivoire
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En Côte d’Ivoire, du fait de l’insuffisance de l’infrastructure sanitaire et de la mauvaise répartition des ressources et personnels en ophtalmologie (95 % des 49 ophtalmologistes sont basés à Abidjan), la majorité de la population n’a pas accès à des soins oculaires de base. Par ailleurs, bien qu’on estime à près de 45 % la prévalence de la presbytie chez les adultes de plus de 40 ans, la plupart d’entre eux n’ont pas accès à des lunettes de lecture. L’équipe du centre d’ophtalmologie méthodiste de Dabou (8 personnes dont 1 ophtalmologiste, desservant une population d’environ 235 000 personnes) a donc mis en place une stratégie avancée et décidé d’associer la prise en charge de la presbytie à celle de la cataracte durant certaines missions en milieu rural.
L’équipe emporte durant la mission des lunettes de lecture prêtes à porter (puissances de +1 à +4 dioptries), qui sont fournies gratuitement par notre partenaire international Christian Blind Mission (CBM). Durant la mission, l’ophtalmologiste effectue un examen ophtalmologique complet de tous les malades. Il confie les cas de presbytie à l’infirmière. Celle-ci est responsable de la mesure de l’acuité visuelle de près (test de Parinaud) et de la vente de lunettes de correction adaptées. En 2007, nous avons examiné 1 301 patients lors de ces missions combinées, dont 403 cas de cataracte et 325 cas de presbytie. Nous avons distribué 121 verres correcteurs. Nous ne faisons aucun profit, mais nous demandons aux patients une petite contribution financière pour les soins, par exemple 2 000 FCFA (4,50 US $) pour la consultation et 3 000 FCFA (6,70 US $) pour les lunettes ; ceci permet de contribuer aux frais de la mission et de responsabiliser le patient (en accord avec les directives nationales). Ces sommes sont très inférieures aux prix des soins à la capitale ou au centre de base.
La vente de lunettes de lecture est plus appréciée que la chirurgie de la cataracte, car les verres correcteurs coûtent beaucoup moins cher qu’une intervention chirurgicale et sont accessibles à presque toutes les bourses. Les patients effectuent leur achat une fois qu’ils ont bien évalué leurs besoins en vision de près ; ils décident parfois d’attendre pour économiser. Environ 80 % des patients qui achètent les lunettes sont alphabétisés et 20 % sont illettrés. Les lunettes de près, en effet, ne servent pas qu’à lire et écrire : elles servent aussi à trier le riz, à raccommoder les filets de pêche, à enfiler les perles, à se couper les ongles, etc.
Ce type de mission de stratégie avancée est très apprécié par les patients ; il n’est pas assez développé en Côte d’Ivoire et doit être encouragé. Distribuer des lunettes de lecture n’est pas aussi simple qu’il y paraît et il est important que des spécialistes de l’ophtalmologie ou des personnels dûment formés s’en chargent. En effet, lorsque des personnes non formées en santé oculaire distribuent ou vendent des lunettes de lecture de village en village, la correction n’est pas toujours adaptée et les lunettes pas toujours de bonne qualité ; les patients en concluent alors que les lunettes « ne marchent pas » ou que la correction n’est pas utile.