RSOC Vol. 08 No. 10 2011 pp 39 - 40. Publié en ligne 01 août 2011.

Prise en charge de jeunes patients à l’hôpital

Caroline Ayilo

Infirmière en pédiatrie, Gertrude's Garden Children's Hospital, Kenya. [email protected]


Dianne Pickering

Infirmière généraliste, Norfolk and Norwich University Hospital, Royaume-Uni.


Fay Gallant

Infirmière en pédiatrie, James Paget Hospital, Norfolk, Royaume-Uni.


Ingrid Mason

Responsable du développement des capacités et conseillère médicale pour CBM, PO Box 58004, 00200 City Square, Ring Road Parklands, Nairobi, Kenya.

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Une salle d'hôpital accueillante pour les enfants. NÉPAL. © Lumbini Eye Institute, Népal
Une salle d’hôpital accueillante pour les enfants. NÉPAL. © Lumbini Eye Institute, Népal

Toute hospitalisation, que ce soit après un accident ou dans le cadre d’une intervention programmée, est susceptible d’angoisser et de perturber un enfant. Vous pouvez cependant prendre des mesures qui contribueront largement à améliorer l’expérience de ce séjour à l’hôpital et à réduire le stress et l’inquiétude éprouvés à la fois par l’enfant et par ses parents.

Un environnement adapté

Il est souhaitable d’avoir une salle d’hôpital ou des chambres réservées aux jeunes patients. Celles-ci doivent être de préférence claires, propres et décorées avec des couleurs vives. Vous pouvez afficher de simples dessins pour décorer les murs et le plafond. Des rideaux et couvre-lits colorés permettront également d’égayer la salle.

Lorsque un enfant présente une déficience visuelle, il faut éliminer tout obstacle autour de lui, dans la mesure du possible. Vérifiez que l’enfant s’est bien familiarisé avec son environnement ; ceci permettra d’assurer sa sécurité et lui donnera également confiance en lui. Pour faciliter les déplacements des enfants présentant une basse vision, peignez les portes, les fenêtres, les poignées de portes et les panneaux dans des couleurs qui contrastent avec l’arrière-plan ; ces enfants se sentiront alors plus à l’aise dans leur nouvel environnement.

Il est important de ne pas séparer les enfants de leurs parents. BANGLADESH. © Clare Gilbert
Il est important de ne pas séparer les enfants de leurs parents. BANGLADESH. © Clare Gilbert

Un comportement amical

Il est très important de faire preuve de gentillesse envers les jeunes patients dont vous avez la charge et de leur montrer que vous vous souciez de leur bien-être. Accordez du temps aux enfants et parlez avec eux en utilisant des mots qu’ils peuvent comprendre. En les écoutant et en les traitant avec respect, vous donnerez confiance aux enfants et vous leur permettrez d’exprimer leurs peurs ou leurs inquiétudes éventuelles.

Lorsque vous vous adressez à un enfant, il est important de faire en sorte que votre visage soit à peu près au même niveau que le sien, en vous asseyant ou en vous accroupissant à côté de lui. Ceci vous évitera de lui parler « de haut » et de l’intimider. Les enfants aiment que l’on s’adresse à eux en utilisant leur prénom ou leur surnom ; demandez aux parents comment l’enfant préfère être appelé.

Ne pas séparer enfants et parents

Dans la mesure du possible, permettez aux parents de demeurer auprès de leur enfant. Dans la plupart des hôpitaux, le seul endroit interdit aux parents est le bloc opératoire.

Si l’enfant doit passer la nuit à l’hôpital, encouragez fortement les parents à rester avec lui. Ceci permettra de diminuer l’angoisse et la douleur éprouvées par l’enfant et contribuera à son rétablissement.

Lorsque cela s’avère possible, effectuez tout geste thérapeutique (à l’exclusion des interventions chirurgicales) en présence des parents. Avant de commencer, l’infirmier ou le médecin peut décrire le traitement au parent en employant des termes simples. Le parent pourra ensuite à son tour décrire le traitement à l’enfant, de façon à bien se faire comprendre.

Il est souhaitable que le parent ou l’accompagnateur tienne la main de l’enfant durant le traitement ; l’enfant sera alors moins stressé et le médecin ou l’infirmier pourront travailler rapidement et efficacement.

L’importance du jeu

Le jeu a pour l’enfant une importance capitale. Faites tout ce que vous pouvez pour aider et encourager les enfants à jouer. Il faut mettre en place un espace de jeu pour les enfants ; ceci est généralement possible même si l’espace en question est de taille réduite. Laissez les enfants jouer avec leurs frères et sœurs (sous surveillance), à condition que cela n’affecte pas leur convalescence.

Vous pouvez également faire appel au jeu pour apaiser les inquiétudes de l’enfant et le préparer à son séjour hospitalier ; certains hôpitaux emploient même des « spécialistes du jeu » pour interagir avec les enfants.

Encouragez les parents à jouer des « jeux de rôle » avec leur enfant. Par exemple, l’infirmière peut faire semblant d’instiller un collyre dans l’œil du parent, pour que l’enfant sache à quoi s’attendre et pour lui montrer qu’il n’y a rien à craindre.

Une autre astuce consiste à distraire l’enfant. Par exemple, si l’enfant concentre son attention sur un jeu ou un jouet juste avant une prise de sang, ceci permettra de réduire l’inquiétude et la douleur éprouvées.

L’admission à l’hôpital

  • Comme nous l’avons mentionné plus haut, il est préférable d’avoir une salle d’hôpital ou des chambres réservées aux enfants. Si ceci s’avère impossible dans votre contexte, attribuez à l’enfant un lit situé près du bureau des infirmiers.
  • Accueillez chaleureusement le parent et l’enfant, puis montrez-leur le lit qui a été attribué à l’enfant et où trouver tout ce dont ils pourraient avoir besoin.
  • Donnez au parent un bracelet d’identification à placer autour du poignet de l’enfant ; celui-ci comportera son prénom et son surnom, si nécessaire.
  • Il n’est pas nécessaire que l’enfant revête une chemise d’hôpital en dehors du bloc opératoire, mais il est souhaitable qu’il porte des vêtements propres.
  • Les parents peuvent apporter à l’hôpital les jeux ou jouets préférés de leur enfant.
  • Identifiez toute préférence alimentaire éventuelle. Si cela est autorisé par la politique de l’établissement, les parents pourront apporter à manger à leur enfant.

L’intervention

  • L’ophtalmologiste doit expliquer aux parents, mais pas devant l’enfant, le but de l’intervention chirurgicale, son déroulement, son pronostic et les complications éventuelles, y compris le risque de décès. Les parents doivent signer (ou marquer d’une croix) un formulaire de consentement. Ils pourront ensuite expliquer tout cela à l’enfant de la manière la plus adaptée. Il est important que l’enfant comprenne ce qui va lui être fait car cela permet d’établir un rapport de confiance.
  • Si l’enfant doit être opéré sous anesthésie générale, il est important de s’assurer que les parents ont compris que leur enfant ne doit ingérer aucun aliment solide pendant au moins six heures avant l’opération. Les enfants nourris au sein ne doivent pas être allaités au-delà de quatre heures avant l’opération. Pour les enfants nourris au lait maternisé, il faut compter deux heures de plus : ils ne doivent pas prendre de biberon dans les six heures (au moins) qui précèdent l’opération. Durant cette période, les enfants et les nourrissons peuvent et doivent boire de l’eau, mais doivent s’abstenir au moins deux heures avant l’intervention.
  • En cas d’anesthésie générale, il est important que l’anesthésiste puisse vérifier la respiration de l’enfant, la couleur de son teint, etc. Avant d’aller au bloc opératoire, l’enfant doit se déshabiller et revêtir une chemise d’hôpital de la bonne taille ; s’il refuse la chemise, vous pouvez le recouvrir d’un drap stérile.
  • N’oubliez pas de faire une marque au-dessus de l’œil qui doit être opéré avec un feutre indélébile (ou avec un morceau de sparadrap).
  • Encouragez le parent ou l’accompagnateur de l’enfant à décrire l’anesthésie comme « un très gros dodo ». Expliquez-leur qu’au réveil les yeux de l’enfant seront éventuellement douloureux pendant un court moment et que l’œil opéré sera peut-être recouvert d’un pansement oculaire. Si vous couvrez d’un pansement oculaire l’œil de son jouet préféré, cela pourra aider l’enfant.
  • Dans l’idéal, le parent devrait accompagner l’enfant de la salle d’hôpital jusqu’au seuil du bloc opératoire. Si l’enfant doit être placé sous anesthésie générale, et si celle-ci est administrée dans la pièce à anesthésie, le parent pourra rester auprès de son enfant jusqu’à ce que celui-ci « s’endorme ». Les parents ne doivent pas franchir le seuil du bloc opératoire.
  • En cas d’anesthésie générale, expliquez aux parents que leur enfant risque d’avoir la nausée pendant les 24 heures qui suivent son réveil. Conseillez aux parents d’encourager leur enfant à boire, sans le forcer. Tant que l’enfant boit, ce n’est pas grave s’il refuse de manger pendant quelques jours.

Prise en charge post-opératoire

  • Encouragez les parents à placer le « doudou » ou le jouet préféré de l’enfant sur son lit d’hôpital, afin que l’enfant le retrouve dès son retour du bloc opératoire. Ceci le rassurera.
  • Faites en sorte que, lorsque l’enfant se réveille après l’intervention oculaire, ses parents soient à son chevet. Les parents peuvent accompagner leur enfant (ou même le porter) du bloc opératoire à son lit d’hôpital.
  • Le médecin doit expliquer aux parents, en dehors de la présence de l’enfant, comment l’intervention s’est déroulée, ce qui a été fait ou trouvé durant l’opération, et le pronostic probable. Lorsque les parents ont compris le pronostic, ils ont plus de facilité à suivre les consignes qu’ils ont reçues sur la prise en charge de leur enfant de retour au foyer et sur l’utilisation correcte des médicaments.
  • Avec l’aide d’un infirmier, les parents doivent expliquer à l’enfant ce qui va se passer, maintenant que l’intervention a été réalisée. L’infirmier peut se servir des jouets dans l’espace de jeu pour montrer à l’enfant comment on va enlever son pansement oculaire et comment ses parents vont instiller son collyre.

Le retour à la maison

Si cela s’avère opportun, le personnel infirmier peut montrer aux parents les soins qui devront être prodigués à leur enfant, à court ou long terme, une fois que leur enfant sera sorti de l’hôpital : application d’un pansement oculaire, instillation d’un collyre ou application d’une pommade oculaire, par exemple (voir page 46). Encouragez les parents à participer à ces gestes de soins et à prendre le relais une fois qu’ils se sentent prêts à le faire. Ceci leur donnera confiance en eux et ils seront capables de s’occuper de leur enfant après sa sortie de l’hôpital.

Dans la plupart des cas, le retour à la maison après une intervention oculaire réussie est un événement joyeux. Toutefois, en cas de perte de vision ou de mauvais résultat visuel, l’enfant et ses parents auront besoin d’un soutien supplémentaire. Assurez-vous que les parents ont conscience des services complémentaires disponibles et encouragez-les à les utiliser, y compris les services de basse vision et réhabilitation. Il faudra aussi aider les parents, en particulier s’ils sont bouleversés par ce qui s’est passé (voir encadré). Il est important de soutenir les parents, car il ne faut pas que l’enfant se retrouve dans un environnement familial tendu après sa sortie de l’hôpital.

Il se peut en outre que l’enfant et les parents se sentent en sécurité à l’hôpital et appréhendent le retour à la maison. Dans ce cas, il faudra éventuellement leur offrir une assistance psychologique (« counselling »), qui comprendra des conseils sur les rôles des différents membres de la famille une fois l’enfant rentré de l’hôpital.

Si leur enfant est devenu aveugle, les parents auront besoin d’être conseillés sur la façon de communiquer avec leur enfant et de se comporter envers lui. Il s’agit là d’un vaste et important sujet, qui déborde du cadre de cet article. Toutefois, voici quelques idées de conseils à offrir aux parents :

  • présentez-vous à chaque fois que vous entrez dans la pièce où se trouve votre enfant
  • expliquez à l’enfant ce que vous êtes en train de faire ou ce que vous vous apprêtez à faire
  • ne chuchotez pas ou ne faites pas de bruit sans expliquer ce vous êtes en train de faire
  • encouragez votre enfant à explorer le monde qui l’entoure avec ses mains, ses pieds et ses autres sens.

Si possible, envoyez les parents et l’enfant chez un ergothérapeute ou un conseiller socio-psychologique qui pourra leur apporter son aide.

Conclusion

Le présent article offre quelques suggestions à mettre en œuvre pour que l’hôpital devienne un environnement moins intimidant et plus accueillant pour les enfants et leurs parents. Vous devriez pouvoir adapter certaines de ces idées à moindre coût dans votre cadre de travail. Si vous prenez le temps de considérer les besoins de l’enfant et de ses parents dans un cadre hospitalier, ceci aura des effets positifs sur la convalescence de l’enfant et sur la réputation de votre hôpital au sein de la communauté.

Soutenir les parents

Lorsque les parents apprennent une mauvaise nouvelle (par exemple, que leur enfant va perdre un œil ou la vue dans un œil), ils peuvent réagir de différentes manières. Certains se replient sur eux-mêmes pour digérer la nouvelle, alors que d’autres deviennent agressifs et exigeants. Il s’agit là de réactions normales en réponse à un stress ou à un sentiment de deuil : les parents doivent en effet faire leur deuil de l’enfant en parfaite santé qu’ils pensaient avoir.

Faites preuve de patience et de gentillesse, mais soyez honnêtes. Si les parents sont bouleversés, proposez-leur de reporter la suite de votre conversation à plus tard dans la journée ou au lendemain. Efforcez-vous d’honorer un rendezvous pris avec les parents, car cela crée un climat de confiance.

Il est souhaitable de faire appel à des conseillers socio-psychologiques professionnels, si possible. Un conseiller devrait aider les parents à trouver le meilleur moyen de communiquer à leur enfant la mauvaise nouvelle. Il pourra également être présent lorsque les parents parlent à leur enfant. Tout ceci prend du temps et il ne faut surtout pas se presser.

Encouragez les parents à créer des groupes d’entraide. Mettez-les en contact avec d’autres parents dont les enfants présentent des problèmes identiques, afin qu’ils puissent communiquer avec des personnes qui partagent leur expérience et leurs inquiétudes.