Augmenter la demande en chirurgie de la cataracte : leçons tirées d’un examen systématique
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La recherche offre des pistes, mais pas de données solides, pour augmenter la demande.
L’augmentation de la demande en chirurgie est un bon moyen de maximiser l’efficacité et l’efficience des services de cataracte. Les programmes qui ne parviennent pas à atteindre un taux optimal de recours à la chirurgie de la cataracte gaspillent parfois des ressources précieuses en adoptant des approches de mobilisation des patients et de dépistage qui n’aboutissent pas à la réalisation d’opérations permettant de restaurer la vision.
En 2020, Sightsavers a réalisé un examen systématique1 pour identifier les facteurs associés à l’adoption de la chirurgie de la cataracte et les stratégies pour susciter la demande dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Sur 18 530 articles identifiés à l’issue d’une recherche dans des bases de données électroniques, seuls sept répondaient à nos critères d’inclusion. On peut donc dire que c’est un domaine de recherche négligé, étant donné l’ampleur du problème de la cécité causée par la cataracte. Deux études ont été menées en Chine, deux en Inde, une au Ghana et une à Madagascar, et l’une des études était une étude multipays menée au Kenya, au Bangladesh et aux Philippines. Deux des études étaient des essais contrôlés randomisés (ECR) et les autres étaient des études d’observation.
Les taux de recours à la chirurgie rapportés dans les études varient considérablement, de 14,4 % dans le nord-ouest de la Chine à 91,7 % dans le sud de l’Inde, mais certains facteurs ont été suggérés comme conduisant à un accroissement de la demande en chirurgie.
Au niveau individuel
Le recours à la chirurgie était plus faible chez les femmes et les patients plus âgés. D’autres facteurs peuvent également jouer un rôle important dans un contexte spécifique, comme le niveau d’éducation ou la situation matrimoniale.
Au niveau communautaire
L’opinion des proches, en particulier la famille et les amis, est un facteur qui peut influencer les décisions des patients. Il est indispensable de réaliser davantage d’études pour mieux comprendre le rôle des facteurs communautaires dans l’augmentation de la demande, afin de pouvoir travailler à changer les normes culturelles lorsque celles-ci constituent un obstacle.
Au niveau du système de santé
Il faut trouver un équilibre entre la nécessité pour les établissements de santé de générer suffisamment de revenus pour payer le personnel et acheter des fournitures, et celle de réduire les obstacles financiers rencontrés par les patients. Il y a deux catégories d’obstacles financiers : les coûts directs (frais chirurgicaux) et les coûts indirects (frais de transport, perte de revenus pendant l’absence du domicile, etc.). En général, la réduction de ces obstacles améliore le recours à la chirurgie, même si l’influence des obstacles financiers varie en fonction du contexte local. Des facteurs tels que la densité de population et les infrastructures de transport locales auront probablement une incidence sur le coût de la chirurgie et, par conséquent, sur le recours aux services. Les hôpitaux ou les autorités sanitaires locales devront déterminer quels sont les principaux obstacles dans leur région et comment ils peuvent y remédier de manière durable.
Il a été signalé qu’une offre de services en stratégie avancée à intervalles réguliers améliorait le recours à la chirurgie de la cataracte ; cela s’explique probablement par une familiarisation avec ces services et par la prise de conscience progressive de la population concernant les avantages des services de soins oculaires. Il n’existe que peu d’études sur ce sujet, donc il faudrait davantage de recherches opérationnelles dans ce domaine, en particulier sur les liens entre les différents facteurs.
Quelles mesures peut-on prendre suite à cet examen des travaux de recherche publiés ?
Notre examen n’a pas identifié d’interventions qui sont systématiquement et fortement associées à une meilleure utilisation des services de cataracte. La principale conclusion est en fait le manque flagrant de données sur les stratégies qui fonctionnent dans les pays à revenu faible ou intermédiaire pour améliorer le recours à la chirurgie de la cataracte (seules deux études, toutes deux menées en Chine, abordent la question).
L’examen fait ressortir un besoin urgent d’études qui évaluent diverses approches visant à améliorer le recours à la chirurgie et leur efficacité dans différents contextes. Il est essentiel que ces études soient d’une taille suffisante pour pouvoir examiner les associations statistiquement significatives entre les résultats et les caractéristiques des patients (comme le sexe ou l’âge), car cela nous aidera à comprendre qui bénéficie de ces approches et qui n’en bénéficie pas.
Les programmes de soins oculaires et les organisations non gouvernementales peuvent réfléchir à des possibilités d’intégrer des études dans leurs programmes et d’en diffuser largement les résultats. Une analyse des données hospitalières pourrait permettre d’identifier les groupes de personnes qui franchissent le pas et ceux qui ne le font pas (les femmes, les personnes handicapées, etc.). L’analyse pourrait être complétée par des études qualitatives sur les patients – par exemple, en interrogeant les patients ou en leur demandant de remplir des questionnaires. Ces études pourraient être réalisées en partenariat avec d’autres organisations ayant une expérience de la recherche qualitative, telles que des institutions locales de formation ou de recherche.
Référence
1 Mailu EW, Virendrakumar B, Bechange S, Jolley E, Schmidt E. Factors associated with the uptake of cataract surgery and interventions to improve uptake in low- and middleincome countries: A systematic review. PLOS ONE. 2020;15(7):e0235699.