RSOC Vol. 18 No. 25 2021 pp 8-9. Publié en ligne 15 septembre 2021.

Comment examiner le segment antérieur de l’œil

Nasiru Muhammad

Ophtalmologiste et maître de conférences, Department of Ophthalmology, Usmanu Danfodiyo University teaching Hospital, Sokoto, Nigeria.


Gros plan d’un œil sain
Figure 1 Œil sain. La pupille est noire, le blanc de l’œil est bien blanc (pas rouge), les cils sont courbés vers l’extérieur, et la cornée et la conjonctive sont transparentes. © Sandip Das Sanyam CC BY-NC 4.0
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Un certain nombre d’affections oculaires courantes peuvent être diagnostiquées en examinant le segment antérieur de l’œil à l’aide d’une lampe torche.

Examen oculaire de base à la lampe torche

Il est important que tous les personnels de santé sachent effectuer un examen oculaire de base. La méthode de référence pour examiner l’œil est l’examen à la lampe à fente, mais on peut réaliser un examen de base du segment antérieur à l’aide d’une lampe torche ; si cette dernière s’assortit d’une loupe grossissante, cela peut être utile, mais ce n’est pas essentiel. On peut également utiliser avec la lampe torche une lentille de + 20 dioptries, si disponible, pour un grossissement de la partie antérieure de l’œil.

La Figure 1 montre un œil sain. Il y a quatre éléments-clefs à examiner :

  • Les paupières
  • La conjonctive
  • La cornée
  • La pupille.

Dans le reste de cet article, nous ne mentionnerons que certaines maladies oculaires courantes, qui peuvent être mises en évidence par l’examen de base mentionné ci-dessus.

Les paupières : leur apparence est-elle normale ?

Gros plan d’un œil présentant un trichiasis
Figure 2 Trichiasis © ICEH CC BY-NC 4.0
Gros plan d’un œil présentant un chalazion.
Figure 3 Chalazion © Face & Eye CC BY-NC 4.0

Lorsque vous examinez les paupières, assurez-vous qu’elles bougent normalement, que leur position est normale et qu’il n’y a pas présence d’œdème ou de grosseur. Effectuez les vérifications suivantes :

  • Les paupières s’ouvrent et se ferment normalement. On parle de ptosis lorsque les paupières sont tombantes et de lagophtalmie si l’occlusion palpébrale n’est pas complète. Si les paupières ne se ferment pas bien, ceci entraîne un risque de lésion cornéenne.
  • Un œil ne fait pas saillie par rapport à l’autre. Quand un œil est plus en avant que l’autre, on parle de proptosis, qui est généralement une affection grave.
  • Les cils s’éloignent du globe oculaire ; s’ils se dirigent vers l’œil, ceci n’est pas normal et on parle alors de trichiasis (Figure 2). Le frottement des cils peut entraîner des taies cornéennes et la cécité.
  • Il n’y a pas d’œdème ou de grosseur sur les paupières. La présence d’un œdème sur le bord palpébral peut être due à un kyste, que l’on appelle un chalazion (Figure 3), ou à l’infection d’un cil (orgelet).
  • Il n’y pas de rougeur ou d’écoulement (sécrétion) au niveau du bord palpébral (ce que l’on nomme une blépharite).

La conjonctive : le « blanc » de l’œil paraît-il blanc ?

La conjonctive est une couche transparente qui part du bord externe de la cornée, s’étend sur la sclère (la partie blanche de l’œil) et tapisse l’intérieur des paupières. La conjonctive comporte des vaisseaux sanguins et, lorsqu’il y a un problème, l’œil apparaît souvent rouge.

Gros plan d’un œil présentant un ptérygion.
Figure 4 Ptérygion © Murray McGavin CC BY-NC 4.0
Gros plan d’un œil présentant une tumeur cancéreuse sur la conjonctive.
Figure 5 Tumeur cancéreuse sur la conjonctive © Stephen Gichui CC BY-NC 4.0

Recherchez les signes suivants :

  • Rougeur conjonctivale (conjonctivite) : celle-ci peut être due à une infection ou à une allergie.
  • Présence d’excroissances tissulaires impliquant la cornée, par exemple un ptérygion, qui est généralement bilatéral (Figure 4), ou une tumeur (voir Figure 5 montrant un carcinome conjonctival).
  • Corps étrangers entraînant une irritation et souvent une rougeur ; il peut être nécessaire d’éverser la paupière, car de temps en temps il y a présence d’un corps étranger sous-palpébral.

La cornée : est-elle transparente ?

Gros plan d’un œil présentant un corps étranger cornéen.
Figure 6 Corps étranger cornéen © Clare Gilbert CC BY-NC 4.0
Gros plan d’un œil présentant un ulcère cornéen.
Figure 7 Ulcère cornéen © Jeremy Hoffman CC BY-NC 4.0

La cornée est la partie transparente du segment antérieur de l’œil. Elle joue le rôle d’une fenêtre et permet aux rayons lumineux de pénétrer dans l’œil. Pour examiner la cornée, éclairez l’œil de manière latérale ; en cas de problème, la cornée apparaîtra opaque ou trouble.

Vérifiez que :

  • Il n’y a pas présence d’un corps étranger sur la cornée ; ceci ne concerne en général qu’un seul œil et s’accompagne de gêne ou douleur oculaire (Figure 6).
  • Il n’y a pas de zones grises ou blanches sur la cornée. La présence d’une zone grise ou blanche sur la cornée accompagnée de rougeur ou douleur oculaire indique vraisemblablement un ulcère cornéen (Figure 7) ; la présence d’une zone grise ou blanche sur la cornée dans un œil qui n’est ni rouge ni douloureux indique vraisemblablement une taie (cicatrice) cornéenne.

La pupille : est-elle noire et réagit-elle en lumière vive ?

La pupille est une ouverture circulaire située au centre de l’iris (qui est l’anneau coloré situé à l’intérieur de l’œil, derrière la cornée). C’est l’iris qui donne à l’œil sa couleur.

La pupille régule la quantité de lumière qui pénètre dans l’œil ; elle est de petite taille lorsque la lumière est vive et de plus grande taille dans une pièce sombre.

Vérifiez :

  • La couleur de la pupille : celle-ci doit être noire. Une pupille blanche ou grise peut être due à la présence d’une cataracte (opacité du cristallin).
  • La forme de la pupille : elle doit être circulaire. Une pupille de forme irrégulière peut être due à un traumatisme ou à une inflammation intraoculaire (iritis).
  • Vérifiez que la pupille devient plus petite lorsque, dans une pièce sombre, vous dirigez vers l’œil un faisceau de lumière vive. Ceci indique le bon fonctionnement du nerf optique à l’arrière de l’œil ; si la taille de la pupille ne diminue pas en lumière vive, ceci peut être dû à une atteinte du nerf.
  • La réaction pupillaire lors du test d’alternance lumineuse (voir encadré ci-dessus).
  • Le reflet pupillaire (voir page 14 de ce numéro).

L’examen attentif du segment antérieur au moyen d’une lampe torche peut permettre à l’agent de santé oculaire d’identifier des anomalies qui pourront aboutir à un diagnostic et aider à déterminer la meilleure prise en charge pour chaque patient.

Test d’alternance lumineuse

Si, à l’aide d’une lampe torche, vous éclairez une pupille, puis l’autre, puis revenez à la première (alternance lumineuse), chaque pupille va se contracter lorsque vous l’éclairez avec le faisceau lumineux. Si ce n’est pas le cas (par exemple si une pupille se dilate lorsque vous approchez vers elle le faisceau lumineux), ceci peut indiquer un signe de Marcus Gunn (ou déficit pupillaire afférent relatif) dans l’œil concerné. Lorsqu’il y a présence d’un signe de Marcus Gunn, ceci suggère une atteinte de la rétine ou du nerf optique.